Les conservateurs et la recherche : quelques portraits

Je ne sais si c’est le cas de toutes les professions mais le conservateur des bibliothèques adore réfléchir et parler de lui-même. Et c’est particulièrement le cas en cette période de changements rapides : on ne sait plus guère en quoi consiste le métier ni quelles sont les missions centrales.

Aussi certaines questions reviennent-elles fréquemment sur le tapis, avec des avis très partagés. Parmi elles, celle du rapport du conservateur à la recherche, à laquelle deux tables rondes étaient consacrées lors des Estivales de l’enssib.

La première de ces tables rondes a tourné autour de quatre questions auxquelles les intervenants étaient libres de répondre :
*La question se pose-t-elle différemment selon le type de bibliothèque ?
*Les conservateurs sont-ils plutôt des médiateurs de la recherche ?
*Quelle type de recherche effectuent-ils ? Peut-on faire une distinction entre recherche fondamentale et recherche appliquée ?
*Les évolutions récentes du métier et son poids de contingences rapprochent-elles ou éloignent-elles de la recherche ?

Les personnes présentes étaient représentatives des comportements des conservateurs-chercheurs :

Delphine Quéreux-Sbaï, directrice de BM surchargée

La première intervenante, directrice de la BM de Reims, représente le type courant : « j’aimerais bien faire un peu de recherche mais les charges administratives sont trop lourdes pour me le permettre ».
Chartiste, elle se passionne pour sa thèse sur la tapisserie d’Aubusson au XXe siècle mais vit le passage à l’enssib comme une coupure intellectuelle.

Depuis qu’elle dirige un important service, son travail se limite à un « entretien des neurones » par quelques notices d’histoire locale (qui « donnent l’impression de ») et surtout une conférence tous les deux mois sur les fonds de la bibliothèque. Impossible de faire plus.

Cristina Ion et Alain Carou, chercheurs ignorés ?

Les deux intervenants suivants travaillent tous deux à la BnF et sont de brillants chercheurs. La première, titulaire d’un doctorat, est membre du comité de rédaction d’une revue savante, le second a publié un ouvrage important intitulé Le Cinéma français et les écrivains. Histoire d’une rencontre (1906-1914) (Paris, 2003).

Tous deux soulignent qu’ils ne font aucune recherche dans leurs activités professionnelles. Et qu’il est plutôt rare d’en faire, même à la BnF : seuls les chargés de collections des départements spécialisés sont en fait appelés à en faire. En revanche, tous deux soulignent la synergie entre leur recherche et leur travail de chef de service ou d’adjoint au chef de service : ils ont l’impression que leur expérience et leurs capacités de chercheur enrichissent considérablement leur travail et le recul qu’ils possèdent sur ce dernier.

Raphaële Bats, d’une recherche générique à une recherche de bibliothécaire

Raphaële Bats travaille en BU, à l’université Lyon 1. Philosophe de formation, elle avait commencé une thèse sur Démocrite. Mais un travail d’enssib lui fait découvrir Sébastien Gryphe et elle présente avec trois collègues une communication au colloque des 450 ans organisé par Raphaële Mouren. Et finalement, Gryphe a fini par prendre le pas sur la thèse, abandonnée : Raphaële continue la recherche, mais en histoire du livre et en dehors des cadres universitaires.

Elle souligne elle aussi la complémentarité des deux activités : l’une et l’autre s’enrichissant mutuellement.

Dominique Arot, jeune chercheur

Bien qu’il ait déjà une très belle carrière derrière lui, ce n’est que récemment que Dominique Arot a soutenu sa thèse, après avoir été inscrit 8 ans. Elle est dédiée à François Mauriac et la musique.

Pour D. Arot, le sujet est récurrent car il s’intègre pleinement dans le clivage qu’il présente comme purement français entre l’université et « ceux qui travaillent ». Il raconte ainsi comment une professeur de Paris IV a rechigné à le prendre en thèse en lui disant à lui, ancien secrétaire général du Conseil national des bibliothèques : « je ne vois pas le mot agrégation dans votre CV »…

Il souligne également l’intérêt de la recherche avec un argument qui me semble fondamental (et maintes fois répété ici-même) : c’est le meilleur moyen de réfléchir en usager et de comprendre les demandes de son public. Et de considérer les chercheurs comme des personnes à servir et non des empêcheurs de cataloguer en rond.

Bien sûr, concilier les deux n’a pas été facile – il parle de conflits d’écriture car rédiger une thèse est difficile quand on passe déjà sa journée à rédiger notes et comptes rendus – mais pour lui, la recherche est nécessaire à « une vie belle et intense » : « s’il faut écrire la nuit, ça en vaut tout à fait la peine ».

Discussions

Les questions ont principalement porté sur deux thèmes :
*le thème des recherches
*l’utilité de la recherche

Je me contente de placer ici quelques remarques qui m’ont semblé intéressantes :
*sont vraiment scientifiques et légitimes, les recherches portant sur les sciences auxiliaires du document. Dès lors, les activités de recherche étaient plus faciles pour les conservateurs d’archives que des bibliothèques. Cela change avec les nouvelles technologies, aux documents à étudier, labiles, non fixés. Cette question redonne sans doute un nouveau sens à la nécessité d’être personnel scientifique (Alain Carou).
*les entreprises de bibliométrie à l’université prenne rarement en compte les « publiants » non-enseignants-chercheurs : il faut s’imposer (Christophe Pavlidès)
*l’agréable du métier de conservateur est de pouvoir mener les recherches que l’on veut sans avoir de comptes à rendre. Sommes-nous bien sûr de vouloir être reconnus institutionnellement si c’est pour avoir les mêmes contraintes de publication que les professeurs du supérieur ? (Alain Carou)

Cette entrée a été publiée le 8 juillet 2010 à 21:26. Elle est classée dans Le travail du conservateur et taguée , . Bookmarquez ce permalien. Suivre les commentaires de cet article par RSS.

15 réflexions sur “Les conservateurs et la recherche : quelques portraits

  1. Le , deltrio a dit:

    Merci pour ces portraits et ces témoignages

    Néanmoins, je m’interroge sur le bien fondé de la question…

    Comme nous le savons tous, il y a conservateur et…conservateur.

    Celles et ceux qui exercent dans les collectivités territoriales se voient surtout demander d’être des gestionnaires rigoureux des équipements dont ils ont la charge…Je doute qu’il puisse leur rester une once de temps pour pouvoir « chercher »…

    Du coup, j’ai parfois l’impression que les conservateurs font une espèce de complexe face aux chercheurs et plus particulièrement face aux universitaires.

    J’aurais préféré une autre question pour ces « Estivales » organisées par l’Enssib : le métier de conservateur, vers une convergence avec les administrateurs?

  2. Le , Isabelle a dit:

    A part les conservateurs en poste à Paris, tous les conservateurs sont nommés loin de leur corpus de recherche. Entre l’acaparement par les tâches administratives et la vie personnelle, il est impossible d’avoir une activité de recherche suivie. Il y a surtout que l’Université REJETTE les non-universitaires que sont les conservateurs, vécus comme des rivaux dangereux. L’absence de dialogue peut aller jusqu’à la grossièreté affichée.

    • Le , rr a dit:

      mon dieu mon dieu, il n’y a de la recherche qu’à Paris, il n’y a de livres qu’à Paris… j’ai l’impression d’entendre un confrère rassis. (heureusement qu’à la sortie de l’enssib les postes sont massivement à Paris, il vient un moment où chacun fait ses propres choix et les assume, si je travaille sur l’histoire urbaine de Paris et que je demande un poste à Pau, c’est quand même mon problème). je reconnais toutefois que l’on peut rencontrer des problèmes pour consulter la bibliographie : c’est mon cas, quelques livres récents dont j’ai besoin ne sont en France qu’à Paris et Tours, c’est normal, je travaille sur l’Italie (heureusement qu’on a inventé le PEB). Pour ma part, mes sources manuscrites sont en Italie, en Allemagne et en Grande-Bretagne, mes sources imprimées sont pour une bonne part dans pas mal de BMC, même si bien sûr quelques livres rares sont à la Réserve de la BnF (où ils sont inconsultables). Inutile de préciser que j’ai longtemps occupé mes 34 jours de congé annuel (en BM c’est ça, je rappelle) à travailler toute la journée en bibliothèque (le charme du dépaysement dans ces cas là est vite oublié).

      Trêve de plaisanterie : il me semble qu’il y a des conservateurs qui font de la recherche depuis des années sur autre chose que le livre ancien et la charte médiévale. Et comme le dit Rémi, de nombreux objets de recherche potentiels sont désormais librement disponibles sur le net. Et si on doit travailler en archives, on peut désormais y photographier en 2 jours des centaines de feuilles et travailler ensuite tranquillement chez soi (je n’ignore pas les cas où de fastidieux dépouillements sont nécessaires pour trouver ce qu’on cherche).
      Et puis on peut changer de recherches, on le fait de toutes façons dans une carrière normale de chercheur. L’exemple de Raphaëlle est tout fait parlant.

      Le problème qui reste entier, et qu’on ne peut pas contourner, c’est comment travailler toute la journée en bibliothèque et se transformer le temps de rentrer chez soi pour se remettre à travailler longuement sur la même chose et garder les idées claires malgré la fatigue? Certes, finir une thèse en occupant un poste à plein temps en bibliothèque municipale est un excellent moyen de maigrir sans rien faire pour, mais… c’est à la fois frustrant et extrêmement épuisant, car à la fatigue réelle de ce double travail s’ajoute cette idée fixe de devoir avancer, avancer…
      RM (l’autre)

      • Salut l’ami,

        La constance et la pérennité de cette interrogation – les conservateurs sont-ils des chercheurs ? – en constituent la réponse : oui, mais visiblement ils ne trouvent pas. Pour élargir et prolonger heureusement un débat qui, à défaut d’importance, n’a pas de fin, je propose d’en inverser les termes : les chercheurs doivent-ils être des conservateurs ?
        – il y a chercheur et chercheur
        – l’identité du chercheur est en plein renouvellement, le métier bouge…
        – les chercheurs sont surchargés de contraintes administratives, etc

        Quant au motif de l’administration comme antagonisme de l’activité intellectuelle, des vraies missions, etc, il me hérisse, surtout de la part de professionnels qui n’ont que le mot « service » à la bouche, sous la plume, ou sur le keypad (ministrare = servir, etc).

        amitiés,

  3. Le , MxSz a dit:

    @RM:

    Ce compte rendu aurait très bien pu être intitulé « Les SASU et la recherche », ou « les administrateurs civils et la recherche », ou que sais-je encore.

    Je te cite : ces conservateurs.trices ne mènent « aucune recherche dans leurs activités professionnelles ». QU’est-ce cela apporte donc pour le métier lui-même, pour les services, hormis dans les niches spécifiques que sont la BnF ou les bibliothèques de recherche ? Par exemple, pour les gens travaillant en BU, où l’essentiel des usagers est en premier cycle ?

  4. @deltrio : On en arrive alors à la question de la pseudo-unité du métier. S’il y a conservateur et conservateur, pourquoi appartiennent-ils au même corps ? Cela a-t-il un sens ? Peut-on encore être « bibliothécaire » dans le monde de l’internet et des métadonnées omniprésentes ?…

    @Isabelle : Je nuancerais énormément le rejet de la part des universitaires. Ils ont souvent une très bonne opinion des conservateurs qui viennent vers eux dans le cadre de leurs recherches. Pour prendre mon petit cas personnel, je n’ai pas tout à fait le même statut que les autres doctorants auprès de mon directeur de thèse, alors que j’ai le même âge que les allocataires et un parcours très semblable. Mais, comme personne déjà en poste, je suis considéré comme un grand alors qu’ils sont encore des petits 😉

    @rr : Oui. D’où la nécessité de finir sa thèse avant d’avoir des enfants…. Après on verra comment on s’arrange…

    @DJ :
    « les chercheurs sont surchargés de contraintes administratives » : oui et ils jugent pour la plupart important de continuer à s’en occuper pour garder la main sur l’université… mais sont tout de même *avant tout* enseignants-chercheurs. C’est peut-être dans l’ordre des priorités et dans les représentations collectives que gît le lièvre.
    Quant à la question de l’administration, je ne pense pas que beaucoup de monde la voie comme le mal absolu : la plupart de ceux qui appuient sur l’intérêt de la recherche soulignent que cette dernière leur ait bénéfique *dans leur mission d’administration*. Si l’on cherche précisément la valeur ajoutée d’un conservateur par rapport à un administrateur, peut-être faut-il regarder par là… La culture, la curiosité intellectuelle et l’énergie nécessaire à une belle recherche sont de puissants atouts pour un directeur.

    @MxSz : Comme titre, je préférerais « les SASU dans le métro » 😉
    Cela apporte je pense une capacité à réfléchir, à prendre du recul, à analyser (cf article suivant). Cela apporte que des bibliothécaires qui ont fréquenté des bibliothèques comme lecteurs comprennent les besoins et les manques. Cela apporte de la compréhension voire de l’empathie pour le lecteur (car des bibliothécaires qui partent du principe que des gens capables de venir le mardi à 14h sont forcément des feignants, cela existe). Cela amène de la curiosité intellectuelle et une capacité à se mettre rapidement au fait d’une problématique (et une personne capable de comprendre en une journée les enjeux et l’état de l’art sur un point précis de recherche scientifique sera capable de la même manière de comprendre rapidement un dossier administratif).
    J’ai l’impression d’être en train d’expliquer l’intérêt que les enfants fassent des études dans un village du Tiers Monde, là… 😉

  5. Le , MxSz a dit:

    @RM: « j’ai l’impression d’être en train d’expliquer l’intérêt que les enfants fassent des études dans un village du Tiers Monde, là… »

    Certes, mais ça va toujours mieux en le disant, car il me semble que ces évidences-là ne le sont pas pour tout le monde.

    A titre personnel et professionnel, je pense que faire de la recherche pour un cons’, c’est bien, c’est formateur, etc.

    Mais je pense également:

    1/ que @dbourrion a raison de dire que les L méritent autant notre attention que les EC;

    2/et qu’en même temps, les EC sont un public particulier car ils sont à la fois usager ET tutelle. Pour le dire autrement: le maire ou l’adjoint à la culture est-il un usager comme un autre dans une Bm ? c’est une question qui est mal posée et je m’en excuse, car le maire ou l’adjoint est rarement prescripteur (et quand il l’est, tout le monde pousse des cris). Mais c’est quand même comme cela que les choses se passent dans pas mal de BU;

    3/qu’on en fait tout un plat, alors que cela n’est qu’une brique parmi d’autres dans la formation et dans le métier (je veux dire par là que cela ne me gêne par qu’il y ait de la recherche à l’Enssib, s’il n’y a pas que cela);

    4/que le principal problème du corps des cons’ n’est pas, pour ce que je peux en voir, qu’il y a trop de gens qui se focalisent sur la recherche. Ou alors si c’est ça, j’aimerais qu’on me le démontre, exemples à l’appui. Pour moi, le principal problème, il est du même ordre que celui qui touche les éditeurs: ils n’ont rien compris à la révolution numérique.

  6. 1/ Malgré ce que @dbourrion croit/tente de faire croire, je le pense bien entendu également. Des conservateurs-chercheurs, ce n’est pas des conservateurs pour enseignants-chercheurs ! Bien au contraire, les EC peuvent souvent se passer de nous alors que les L ont besoin de conseillers connaissant bien leurs besoins et les fonds disponibles pour les aider : c’est à dire de personnes possédant des compétences disciplinaires.
    Pourquoi certains L échouent-ils en grand nombre ? Précisément parce qu’ils sont laissés à eux-mêmes et n’ont personne à qui demander des renseignements. Comme je le disais sur le blog du susnommé, à l’étudiant de L1 bio qui dit « Je cherche un livre qui classe les espèces selon leurs différences génétiques », j’aimerais bien avoir des conservateurs spécialistes de ces choses capable de répondre : « Le Lecointre ? Il est juste là : vous voulez que je vous explique comment ça fonctionne ? ».
    Et cela, c’est une véritable valeur ajoutée, qu’un administrateur n’aura pas. Et c’est comme cela qu’on fait réussir les étudiants.
    Proposer des BD et des jeux vidéos en BU, la transformer en bibliothèque de lecture publique voire de loisir, c’est certes bien gentil mais cela constitue des actions à destination des gens bien intégrés au système, à ceux qui réussiront sans nous… et c’est finalement un gigantesque mépris vis-à-vis des étudiants en difficulté.
    « Tu risques de louper ton année, n’as pas les moyens d’acheter un manuel et ne sais de toute façon pas lequel prendre ni comment travailler ? Ah, désolé, mon gars, le conservateur met en place la politique documentaire des BD et passe chez les pharmacien du coin pour pouvoir distribuer des capotes [sic]. Ah ben oui, on est une BU moderne, on est là pour que les gens s’amusent sur la plage, pas qu’ils réussissent leurs études… »

    2/ Oui

    3/ Euh, la question est surtout « est-ce qu’on pourra en mettre un peu (uniquement pour donner de la curiosité intellectuelle) au milieu d’une formation où la gestion et le management se paiera la part du lion ? »

    4/ Parfaitement d’accord.

    • Le , AnneB a dit:

      Bonjour Rémi,

      Tout d’abord, chapeau bas pour ton travail de biblioblogueur que je suis avec intérêt depuis quelques mois maintenant. Et pour ces deux articles en particuliers qui posent beaucoup de questions… que les DCB se posent déjà en cours de formation, génération après génération (et notamment les p’tits territ’).

      Pour revenir sur la place de la recherche dans le futur schéma du DCB, je ne suis pas aussi sûre que toi qu’elle perde du terrain par rapport à ce que nous avons pu connaître les uns et les autres. Je n’ai pu assister qu’à le demie-journée de présentation aux partenaires, et n’ai donc pas profité de la richesse des débats qui l’ont précédée. Néanmoins, ce que j’ai entendu durant cette présentation m’a paru très équilibré et laissant une place toujours aussi honorable au travail de recherche. Le fait que, depuis le DCB 18, les sujets soient arrêtés plus précocément dans l’année, et donc que le travail puisse démarrer plus tôt, me paraît être un signe de cette volonté d’équilibre entre les différents aspects de ce qui fait notre métier.

      Après, pour l’application concrète sur le terrain… je suis la première à regretter de n’avoir pas encore trouvé le temps de développer le site professionnel communautaire sur le manga que j’ai en ligne de mire depuis la soutenance de mon mémoire, non plus que d’approfondir mes recherches sur ce domaine culturel. Pour l’heure, ma « recherche », si on peut vraiment appeler ça comme ça, se limite à compulser entre deux dossiers et trois réunions ce que je peux trouver sur les publics en délicatesse avec la culture écrite : on est bien loin du glamour des mangas, mais en plein dans le concret du travail de mon équipe aujourd’hui, et il faudrait, pour bien faire, que j’y consacre beaucoup plus de temps que les quelques heures par mois que j’arrive à dégager. Seulement, la réalité, comme l’ont déjà dit d’autres collègues, c’est que mon élue et mon DAC ne me « paient » pas à faire des recherches, aussi utiles puissent-elles être dans le cadre des missions de mon équipement. Ils attendent de moi que je gère, que j’organise, que je réforme et que je rationalise. Sans nier l’intérêt de la recherche, loin de là. Mais c’est une question de… priorités.

      Et contrairement à la plupart des jeunes chartistes, j’étais déjà maman en entrant à l’Enssib. Alors le cumul boulot + famille + recherches sur mon temps personnel… je vois assez bien où ça peut mener : directement en cure de sommeil 😉

  7. Le , MxSz a dit:

    Sur ta réponse au 1/, tu fais comme si la désintégration des limites entre BU et lecture publique, telle qu’elle se profile/met en oeuvre à Angers, se faisait au détriment de missions « traditionnelles » – non en fait, au détriments des missions qui auraient dû être celle des BU, ie. essentiellement aider les étudiants de L à réussir dans leurs études (c’est un peu le reproche que faisait Finkielkraut, en reprenant R. Hoggart: vous les bibliothécaires, vous refusez la prescription, etc. etc., vous êtes devenus des bibliothécaires démocrates, alors que le savoir ne l’est pas, etc.). Et bien c’est à mon avis vite dit, ou, comme qui dirait: faut le prouver.

    Après un autre débat, ce pourrait être: si on veut mettre en oeuvre des learning center à la française, dont le but si j’ai bien compris est aussi de favoriser la réussite, de quel types de compétences a-t-on besoin? Faut-il des cons’ ou des bib’ chercheurs, des managers, des enseignants? Je pense dans ce cas qu’avoir fait de la recherche, ça peut aider. Car un chercheur (en SHS) ça dépouille, ça interroge, ça classe, ça évalue, ça observe, ça enseigne, ça s’adapte, ça anime (des réunions, des groupes de travail), entre autres: toutes compétences que l’on peut acquérir ailleurs, mais qu’on peut aussi acquérir là.

    Avoir fait de la recherche, ça peut aussi donner un surcroît de légitimité non à la personne, mais au lieu bibliothèque comme lieu d’enseignement (ce à quoi je crois très fort). Mais un en EC rattaché à la BU pourrait tout aussi bien faire l’affaire…

  8. Le , Deltrio a dit:

    Quelle place pour la formation à la recherche dans le parcours de formation des conservateurs? A cette question, j’ai envie de répondre que cela doit rester optionnel.

    Certes, l’Enssib doit favoriser les conditions pratiques de réalisation de la recherche pour celles et ceux qui sont déjà engagé(e)s dans cette voie. Cela suppose de leur octroyer des autorisations d’absence et de régler le problème de l’organisation de la scolarité. Pour celles et ceux qui souhaiteraient s’engager dans un travail de doctorat, il faudrait que l’école prévoit là aussi des aménagements horaires et des séminaires de méthodologie.

    Mais, je le redis, tout ceci ne devrait être qu’une option possible et non pas quelque chose d’imposé à l’ensemble d’une promotion.

    En amont, cela signifie évidemment que la scolarité des élèves-conservateurs tienne compte de leurs parcours individuels respectifs, autrement dit c’est la mise en place d’une réelle formation personalisée (individualisée?).

    Je termine sur un autre point, qui à mon avis, devrait faire aussi débat. Les élèves-conservateurs sont, pour le dire vite, des femmes et des hommes de l’écrit, des médias, de la transmission des savoirs sous toutes les formes, de futurs managers etc… Dans ces conditions, il me semblerait plus judicieux de pousser celles et ceux qui veulent faire de la recherche vers des domaines très en relation avec leur futur champ d’action…

  9. « je ne vois pas le mot agrégation dans votre CV »

    L’agrégation est un concours de recrutement de professeurs de l’enseignement secondaire, je me demande quelle pertinence elle a pour un chercheur. S’agit-il de justifier que l’on a une culture générale en dehors de son domaine de recherche? Ne serait-ce pas normalement le rôle de la licence, maîtrise, M2, cours d’école doctorale?

  10. @DM

    C’est juste la norme officieuse dans toutes les disciplines avec une agrégation du secondaire. Je ne pense pas que cela joue au niveau de la qualification, mais alors pour être auditionné, ça… c’est un sésame dont on ne peut pas se passer (il y a bien sûr des exceptions, mais…).

    • @DM et @M Ça risque, je pense, de passer avec le manque de personnel dans l’enseignement secondaire (si jamais l’agreg n’est pas purement et simplement supprimée avant cela). Je le cas parmi mes amis d’une demoiselle qui devait finir sa thèse grâce à un poste comme ATER. Mais elle est agrégée et l’académie où elle avait été affectée – en manque de profs – a refusé de lui laisser une année supplémentaire et elle l’a donc à peu près abandonné, au moins pour un an. Si on refuse aux agrégés toute possibilité de terminer leur thèse, il est certains qu’ils n’auront plus les postes du supérieur. En l’occurrence, c’est tout simplement stupide cette demoiselle n’a passé l’agreg que parce qu’on lui avait dit qu’elle était nécessaire pour devenir prof de fac et qu’elle n’a aucun goût pour le secondaire alors qu’elle est une chercheuse brillantissime.
      De la gestion des ressources humaines à l’Education nationale…

Laisser un commentaire