Un abonnement aux musées, c’est pour quand ?

Les vacances sont souvent l’occasion de visiter musées et monuments partout en France. Mais, bien que je ne doute pas que les prix soient justifiés par des coûts élevés, les tickets d’entrée sont souvent très chers. Ayant déjà renoncé à des visites pour des questions de prix, je n’ose imaginer ce qu’il en est pour une famille avec trois enfants.

Ceci est d’autant plus surprenant qu’il est des pays où une solution simple a été trouvée. Aux Pays-Bas, où je passe une partie de mon temps, on achète pour moins de 50 euros (moitié prix pour les jeunes) une Museumkaart. La Museumkaart est un abonnement à pratiquement tous les musées du pays. On y entre pendant un an, autant de fois qu’on le désire, sans aucune limitation et, dans les grands musées, en coupant la file.

391 musées y participent. Des plus gros et touristiques (Rijksmuseum, Van Gogh, etc.) aux plus petits (3 musées à Amersfoort, les musées municipaux de presque toutes les villes et les châteaux de la campagne). Qu’ils dépendent de l’Etat, d’une municipalité ou soient privés.

L’idée est excellente. Pour ceux qui vont habituellement au musée : on peut se permettre de revenir, d’y passer 5 minutes en allant faire les courses, de découvrir un lieu consacré à telle thématique qui ne nous intéressait a priori pas tellement. Pour ceux qui n’y vont que rarement : débourser 12 euros pour aller une unique fois au musée est bien cher mais 50 euros pour l’année passe bien mieux ; et surtout, l’homme étant ce qu’il est, il cherche à rentabiliser son achat et fréquente donc plus qu’il n’aurait fait en achetant ses billets un par un.

Pendant ce temps-là en France, des cartes d’abonnement existent… mais musée par musée. Cela part dans tous les sens, sans stratégie d’ensemble. Il vous en coûtera de 15 à 80 euros dans le complexe systèmes de cartes du Louvre, 37 euros (à la place de 46, whatever that means) à Orsay, 35 euros au Quai Branly etc. Dans le domaine du patrimoine architectural, la Demeure historique propose un abonnement à 140 bâtiments (carte à 45 euros).

Cela reste très cher et surtout, on a l’impression que chaque musée fait cavalier seul (voire qu’ils se concurrencent entre eux avec tous les coûts induits de marketing) quand les Pays-Bas proposent un accès aisé et unifié à la fois dans l’intérêt du public… et celui des musées eux-mêmes.

Cette entrée a été publiée le 22 août 2012 à 07:02. Elle est classée dans Relation au lecteur, Relation aux tutelles, Sale histoire et taguée , , . Bookmarquez ce permalien. Suivre les commentaires de cet article par RSS.

14 réflexions sur “Un abonnement aux musées, c’est pour quand ?

  1. Le , Trizek a dit:

    Marketing ! Le mot banni du domaine culturel « noble » français ! J’ai déjà entendu une salle quasi-huer un conférencier pour avoir évoqué le mot lors d’un colloque pour le secteur culturel…

    Cette absence d’abonnement général est juste symptomatique du manque de collaboration, de stratégie globale, de veille, d’innovation et de concertation avec le public. Oh, cela se fera, mais une fois les musées obligés de le faire, ou contraints par la force ; comme d’habitude, il sera déjà trop tard par rapport au reste du monde.

    Les rares qui voudront se lancer seront regardés comme des parias, et rejetés comme tel. Quelques années plus tard, quand ils apportent la preuve de leur succès, tout le monde se met à faire la même chose en s’étonnant de l’absence totale de retours…

    Initiative ? Jamais, dès fois qu’on se plante. Cela serait la honte.

  2. Comme le dit Trizek, il y a probablement une forte contribution des facteurs institutionnels. Pour ne prendre que les musées parisiens, leur structure de gouvernance les incite à maximiser leur nombre d’entrées, y compris au détriment de celui des autres musées. Le visiteur est perçu comme une ressource rare qu’on se dispute plutôt que comme un pool qu’une action concertée peut faire grossir (tout parallèle avec la vision du marché du travail en France est évidemment pertinent).
    Un autre motif peut jouer, celui de la crainte sur la répartition des gains d’une telle carte. Les petits musées peuvent craindre que les gros ne siphonnent plus que leur part des revenus, tandis que les gros craignent un système de subvention implicite des petits musées, tout ce monde craignant unanimement de voir une partie du produit récupéré de manière discrétionnaire par l’émetteur de la carte (Ministère de la Culture, par exemple).
    Rien de cela, toutefois, n’est une contrainte dure, mais la combinaison d’un échec patent de coordination et d’une culture de la concurrence exacerbée dans le domaine de la culture (même si, comme le souligne Trizek, il est impensable de l’admettre en ces termes).

  3. Pour avoir testé avec le muséum de Toulouse, l’abonnement au musée donne un rapport totalement décomplexé au lieu : on peut y aller sur sa pause déjeuner, y revenir au printemps / été / automne, on ne culpabilise pas de ne pas « tout faire » la première fois et donc on profite beaucoup mieux.

    Cela serait évidemment encore mieux avec un pass commun à la ville (pour l’année au moins), voir au pays, voir (attention, idée osée), à toute l’Union Européenne. Voir des musées gratuits avec dons encouragés, comme à Washington.

  4. Je ne suis pas sûr qu’il y ait une véritable demande pour ce produit. La plupart des gros consommateurs (secteur de la culture et de l’enseignement) ont obtenu la gratuité grâce à un lobbying efficace. Les publics avec peu de moyens (jeunes, chômeurs) en bénéficient également. Bien évidemment il reste les familles, mais veulent-elles aller dans de nombreux musées un peu partout en France ?

  5. Tu veux dire que la Réunion des Musées Nationaux pourrais sortir une carte au lieu de leur bordel pas possible ? (tu as oublié la Césame, grand moment, aussi…) Ce n’est pas français !

    À Berlin, le système de carte-à-touriste pour trois jours donne une carte-à-l’année qui vaut une quarantaine d’Euros pour les étudiants (de mémoire). C’est moins bien qu’en Hollande, mais déjà pas mal comme début. Le must du must de l’insurpassable : Londres, où à part les expos temporaires (qui cognent grave — un peu moins qu’en France, ceci dit), tout est gratuit (ou presque, le Somerset House est payant, ainsi que quelques musées privés à pas cher).

    Mais de la culture accessible ?? Et puis quoi encore ! (Vu la taille des files d’attente et le nombre de touristes à tondre…)

    [Dernier conseil pour avoir VRAIMENT tous les musées gratuit, y compris les expos temporaires — même Pompidou, dont les prix pratiqués sont indécents —, mieux que d’avoir moins de 26 ans ET étudiant, il faut être… chômeur !!!]

  6. Le , Passante a dit:

    Peut-être faut-il simplement sortir de Paris, mais rester en France 🙂

    Il y a une carte multimusée à Lyon (pour tous les musées municipaux, carte annuelle -20 euros), ainsi qu’un « pass touristique » à durée réduite pour l’ensemble des musées (y compris privé!).
    Tarification intéressante au musée Fabre à Montpellier : billet valable la journée, avec autant d’entrées / sortie que souhaité ; billet expo temporaire valable un an pour voir en plus les collections permanentes ; billet « famille », abonnement annuel, petit prix avec le « Pass’ agglo ». Bref, on sent la nécessité de « fidéliser » le public local, et pas seulement le public « national cultivé ».

    J’ai répondu sur les deux villes qui me sont le plus familière, mais en cherchant, vous en trouverez sans doute d’autres.
    Les structures dépendant de collectivités sont obligées de se demander comment faire revenir le public habitant ce territoire, et aussi de trouver des formules pour bien accueillir le public touristique. De ce point de vue là, la décentralisation et la logique mon-visiteur-est-un-électeur est assez efficace.

    On pourrait rêver, bien sûr, que toutes les structures d’un même territoire dépendant de collectivités différentes se regroupent sur une même carte annuelle, et non touristique à durée réduite. Mais, de manière générale, il y a de l’innovation en province.

    En revanche, le MCC a effectivement oublié depuis assez longtemps de se préoccuper de ce genre de question. Le précédent ministre nous avait expliqué que c’était la culture elle-même qui, par sa nature, éloignait le public, ce qui permettait de s’exonérer d’une réflexion sur les impacts tarifaires sur le succès ou l’échec des offres culturelles… L’actuelle ne laissera sans doute pas écrire de telles sottises, mais l’administration centrale est désormais majoritairement composée d’administratif, dont la connaissance des publics, des collections des métiers et de la médiation est… assez indirecte, dirais-je. Or, l’impulsion ne peut guère venir que de là, les EP n’étant pas dans des logiques collaboratives (ce que l’on peut pas leur reprocher, puisqu’ils sont priés d’afficher des ressources propres en augmentation..).

  7. Le , Passante a dit:

    Autre exemple:
    Toulouse a mis en place une carte « toulouse culture », donnant un accès à tarif réduit aux musées, bibliothèque, à certaines salles de ciné, et de concert. Tarif réduit aux Augustins : 2 euros (soit deux cafés BnF?) ; au museum, c’est 4 euros (mais il y a une carte annuelle, qui existe au format familial – avec accès à toutes les expos et animations, et aux jardins).

    Remarque un peu « pied dans le plat ».
    J’ai toujours suivi les questions de politique tarifaire dans les établissements culturels, parce que je viens d’un milieu modeste, et donc que le discours « le prix n’influe pas sur les pratiques culturelles » m’a toujours fait braire (bien entendu, le prix n’est pas seul en cause dans la difficulté à franchir le seuil d’un musée ; mais de là à dire qu’il ne joue pas, ou peu…). Mais je les suis bcp plus assidûment depuis que, ayant changé de crèmerie, je ne suis plus titulaire de la merveilleuse petite carte bleue du ministère, celle qui permet de rentrer gratos.
    Et je me demande de plus en plus si, à partir d’un certain indice de rémunération (qui corresponde à des fonctions décisionnelles – type cons’ chef minimum – les autres catégories de personnel et les conservateurs débutants, on les paye déjà suffisamment au lance pierre pour ne pas en rajouter!), il ne faudrait pas remettre cette gratuité en question. Certes, aller voir ce qui se fait chez les autres fait partie de notre formation continue. Mais à ne jamais payer, on finit par ne plus se représenter ce que le tarif d’entrée représente. Un simple tarif réduit changerait déjà les choses.

  8. Bonjour,

    En voici une idée qui est intéressante !

    Ayant moins de 26 ans et fréquentant un peu les musées, je ne paye pas. Mais je sais que passé cet âge je réfléchirais un peu plus avant d’y aller.

    Je crois que les offres d’abonnements ne viennent pas des musées mais des collectivités :la carte musées de la ville de Lyon, le pass Lorraine -mais d’avantage orienté tourisme . J’ai vu aussi des universités proposer des offres :le pass culturel à l’univ de Metz, pour 2€ permet d’avoir un moitié prix -ou presque- à pas mal d’offres culturelles. Malheureusement cette offre était -en 2009- connue presque exclusivement par les étudiants en art, ce qui rejoint l’avis de de Pierre sur le fait que les plus consommateurs savent comment faire pour avoir des prix réduits, mais pas les peu fréquentant.

    La démocratisation culturelle est plus dure à mettre en œuvre que le pensait Malraux ^_^’

  9. Le , entrezvo a dit:

    Ni Paris ni ses musées ne sont faits pour la France ou la peuple. Ce ne sont que des parcs d’attraction pour cars de touristes. Les seuls à pouvoir encore s’en tirer, et c’est heureux, sont les étudiants en école d’art. Conclusion ? J’irai voir des Géricault et des Poussin à Lyon, Toulouse, Montpellier et, puisque l’aura des oeuvres a disparu en notre ère de reproductibilité numérique, je me contenterai de voir la Joconde sur l’Entarweb…

  10. Merci ! Je ne savais pas du tout que ce système de carte existait, du coup j’ai regardé quelle était la situation à Strasbourg, et… Je suis aux anges !

    Il existe une carte des musées du Rhin supérieur : 230 musées en France Allemagne et Suisse. La carte coute 76 euros et donne aussi droit à des réductions dans certains théâtres, pour certains spectacles, et même pour le zoo !
    Site : http://www.museumspass.com/fr

  11. Entièrement d’accord. C’est une idée que je défends aussi à Louvrepourtous comme alternative à la gratuité totale. Elle a déjà été proposée par le député Alfred Recours qui a imaginé la loi sur les Musées de France votée en 2002, s’appuyant justement sur l’exemple néerlandais. En France, il existe des cartes municipales ou trans-régions comme dans l’Est. Et en Ile-de-France où il y a la plus forte concentration de musées et monuments, il existe le Paris Museum Pass dont profitent essentiellement les touristes puisqu’elle propose trois formules jusqu’à 6 jours mais pas plus. Mais cet exemple montre que les établissements sont capables de se réunir sous une même carte puisqu’elle compte environ 60 établissements (avec une info mensongère qu’elle est coupe-file, ce qui n’est pas vrai partout).

  12. Tout à fait d’accord, et +1 avec Léna. J’ai une carte au Louvre (et du coup à Orsay) ainsi qu’à Cluny, et j’apprécie beaucoup de pouvoir passer quand je veux. Je n’aime pas devoir sortir mon portefeuille quand j’entre dans un musée, donc je préfère séparer l’acte de payer de la visite. Comme le dit Palpatine, Londres reste un must : il n’y a même pas de caisse comme c’est le cas au Met. On entre, et quelques mètres plus tard on est au milieu des vitrines.

    Pierre : il reste les vieux, clientèle classique des cartes et des expos. On doit supposer qu’ils ont tous les sous suffisants avoir une collection de cartes.

  13. Le , vermer a dit:

    « les vieux » n’ont pas forcement les sous et ils seraient très heureux que l’accès aux musées et expos soit plus simples,un abonnement à prix raisonnable et une carte unique on en rêve !!!

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